05/06/2013 - Vous passez vingt fois sur le chemin qui descend au Belvédère Genevoix, sans rien remarquer. Il y a bien une petite boule, genre paquet de graines, tombée dans une vague toile d'araignée...
La vingt et unième fois, vous effleurez la branche de chêne, et vous voyez la boule "éclater" littéralement !
Car ce n'étaient pas des graines, mais bel et bien des animaux. A regarder de plus près, il s'agit de minuscules araignées dont l'abdomen est jaune avec une tache noire à l'arrière.
Sur un entrelacs de Chèvrefeuille voisin, il y a justement une autre double "nursery" de bébés-araignées :
Qui dit "bébés" dit "Maman" (pour nous, au moins !).
Nous cherchons donc la génitrice-nourricière de cette petite famille dans le voisinage immédiat. Serait-ce celle-ci, où l'on retrouve des couleurs jaune et noir sur l'abdomen ?
Il s'agit d'une "Tétragnathe", ici en vue ventrale (Tetragnatha sp.).
Ou celle-là, à l'abdomen joliment décoré, mais sur fond blanc ?
Ici, il s'agit d'une "araignée crabe" (famille des Thomisidae) : Ebrechtella tricupidata femelle... qui dévore lentement une autre araignée. Pas très ressemblante aux bébés.
Mais voici que dans la nursery, où ceux-ci se sont dispersés, apparaît une nouvelle venue : serait-ce enfin la mère, qui viendrait protéger ses petits ?
Il s'agit maintenant d'une petite "Epeire concombre" (Araniella sp).
Or, vérifications faites, ces petits ne sont pas ceux de l'une des trois araignées précédentes, mais ceux de l'Epeire diadème ( Araneus diadematus). Vous savez, cette charmante araignée forestière orbitèle (c'est à dire qui construit des toiles circulaire entre deux arbres...), dont la femelle a tendance à dévorer le mâle (deux fois plus petit) lorsque celui-ci s'approche d'elle à un moment inopportun... c'est à dire à peu près tout le temps.
On nous apprend aussi que "rares sont les femelles d'araignées s'occupant de leur progéniture après la ponte." La mère indigne n'aurait donc pas traîné dans le secteur, sa recherche serait vaine ? Cela paraît confirmé si on en croit Wikipédia : "Une fois fécondée, la femelle dépose ses œufs dans un cocon protecteur avant de se laisser tomber pour mourir d'épuisement." Mais dans ce cas, il nous faut retirer les termes " mère indigne" !
Epilogue :
En photographiant l'Epeire concombre au milieu de la nursery, il nous avait semblé un moment voir à travers le viseur l'adulte capturer et faire disparaître un bébé, idée monstrueuse vite repoussée...
Pourtant, on nous dit : "C'est tout à fait possible, voire probable, la plupart des araignées n'ayant aucun scrupule à se nourrir d'autres araignées - parfois de la même espèce-."
Un horrible pressentiment nous fait retourner voir le nid : il n'y reste que quelques individus dispersés.
Et le lendemain matin, plus rien ! Alors, dévorées par l'Epeire concombre, nos petites araignées, ou parties chacune de son côté car ayant atteint la maturité ? On ne le saura jamais !
Merci à Sébastien Damoiseau pour son aide technique. Allez voir son remarquable blog "La tourbière de la Guette".
Repris d'un article publié le par Jim